CHRONIQUE 56 SI LES REQUINS N’ETAIENT PAS LA[1]
Les atolls de RANGIROA et FAKARAVA sont des spots de plongée de
notoriété mondiale pour leurs requins – plus encore leurs « murs de
requins » faisant face à leurs 4 passes[2]
toutes les 12 h à marée descendante.
CAPTAIN CAP – toujours grognon – relève en son for intérieur qu’il n’y a
sans doute autant de requins dans les autres atolls … et bien ailleurs qu’aux TUAM[3] of
course !
Heureusement, les requins méconnus en mauvaise passe ne
sont pas jaloux ; en revanche, les multiples espèces de tous ordres
proliférant sous les regards émerveillés du plongeur néo-baptisé dans ces 4 passes ont
toutes les raisons de l’être.
CAPTAIN CAP l’a vécu intensément lors d’un 2° baptême - avec un
mono juste pour lui -dans la mythique passe de TETAMANU (quel privilège
de devenir un poly-baptisé récidiviste sous-marin en ces lieux !).
Les forts courants traversant la passe nourrissent un
extraordinaire jardin aquatique dont aucun mot ne saurait restituer les
exceptionnelles beautés… avec ou sans requins empêcheurs de tourner en
rond !
CAPTAIN CAP estime qu’en dire quelques mots est – très imparfaitement -
rendre justice à l’Œuvre du Créateur.
Bien sûr, il y a les reliefs ; ensuite les
coraux et les algues ; puis les infinis poissons ; et tout
ce qu’on oublie (holothuries, crustacés, gastéropodes, céphalopodes…)… et que l’œil
non-averti ne distingue pas !
Difficile de rendre compte des reliefs tourmentés
d’une passe atollienne traversée par de violents courants montant et descendant ;
une gorge étroite tarabiscotée, hérissée de creux et patates chaotiques,
ouvrant sur des prairies sous-marines, avant de chuter dans les obscures abysses du tombant…
Tout pour créer l’éternel cycle naissance / vie / mort, dans
un infini aller-retour lagon/océan - océan/lagon !
Les coraux tapissent de leur multiples couleurs les plus
menus espaces de leurs propres formes contournées ; nul corail ne
ressemble à un autre, comment se lasser d’en contempler la variété
insaisissable ?
Cependant, CAPTAIN CAP éprouve le sentiment que les coraux - produits par des êtres vivants – ne font pas l’objet d’une attention particulière des plongeurs professionnels, comme s’ils allaient de soi dans un décor convenu mettant en valeur les autres acteurs de la pièce.
Les passes favorables à la prolifération de la vie génèrent
une vie incommensurable en termes d’êtres à branchies, écailles et nageoires
diverses !
CAPTAIN CAP est frappé par leur incongrue diversité : comment le
même lieu peut-il laisser proliférer tant de formes délirantes aux couleurs
aussi baroques ? Absolument ingérable pour des humains tristement
identiques…
Impossible – surtout pour le moins capable des naturalistes –
de les évoquer tous.
CAPTAIN CAP distingue enfin les orphies des
poisson-trompette faciles à confondre dans le style ‘plus effilés que moi
tu meurs !’.
Pour leur faire pièce, quoi de plus massifs que le napoléon
ou le poisson-perroquet à bosse avec leurs fronts protubérants justifiant d'une taille impressionnante ?
Entre les deux, on trouve les massifs mérous - aux multiples camouflages tachetés - et les poissons-perroquets aux couleurs chatoyantes sous la lumière bleutée.
Puis entre ces extrêmes (mais où mettre les bornes ?), la création donne libre cours à son génie inventif dans un délire de formes et de couleurs flashy.
Quoi de plus étrange que le nason avec son long rostre
entre les deux yeux heureusement latéraux pour ne pas loucher ; ou les poissons-cocher
- et tous les poissons-papillons
colorés de jaune-citron - avec l’immense filament de leur nageoire
caudale ?
N’oublions l’infinie variété des demoiselles défendant avec hargne leur trou de roche contre tout intrus malgré leur taille minuscule (même ici !) : demoiselle à trois points ou à queue dorée…
Impossible de décrire une telle luxuriance… il
faudrait cent baptêmes et mille heures !
Tout à coup surgissent de l’obscurité du tombant deux requins gris de récif présentant tous les signes d’une excitation squalique … de l’aveu du mono APRES la plongée, celui-ci ayant été inspiré par la bonne intention de faire découvrir au CAPTAIN CAP quelques requins faisant la réputation de la passe (merci à lui !).
CAPTAIN CAP – résigné sur son triste destin gastronomique - ne peut s’empêcher
d’être saisi par une brusque pensée-réflexe sous sa combinaison BEUCHAT toute neuve…
« Si les requins n’étaient pas là… nous serions tous
en paradis… »
… pour admirer sereinement
les milles et une chimères inouïes
imaginées par la nature !
Certes, mais pour le shark diver, à quoi bon la "nature" sans frissons de terreur traversant l’échine face à d’impitoyables
requins en quête de proies indifférenciées ?
Une métaphore existentielle de hypermodernité triomphante (les accidents sont rares, ils
n’arrivent qu’aux autres, c’est leur faute, les requins sont des requins) ?[4]
[1] Les photos ci-dessous ne sont pas de CAPTAIN CAP ;
il est difficile de les prendre lui-même alors qu’il est occupé à respirer
contre-nature par la bouche pour réguler ses poumons-ballast en tentant d’admirer
ce qui l’entoure dans un laps de temps limité (40 mn).
[2] FAKARAVA
se caractérise par 2 passes – au nord et au sud - ; RANGIROA a également 2
passes, mais toutes au Nord à quelques 5 km de distance.
[3]
Abréviation in de TUAMOTU ; ainsi que RANGI pour RANGIROA ;
FAKA pour FAKARAVA … le shark-diver s’exprime par rares
onomatopées … par mimétisme avec ses amis-requins ?
[4] Au même
moment, CAPTAIN CAP découvre dans un fil d’actualité que le QUEENSLAND
(Australie) investit 80 millions $ dans la protection de ses très
fréquentées plages touristiques contre les requins suite à deux attaques
mortelles... hypermodernes OK mais fun !
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